Covid-19 : « Au CHU de Nancy, la digue tient » le 23 mars 2020 Ce qui est insupportable et angoissant avec ce nouveau virus, c’est de se demander si on va pouvoir soigner tout le monde.

, dans le réseau de Arounie Tavenet

Interview dans Le Point du Pr Christian Rabaud, chef du service d’infectiologie du CHRU de Nancy ​et Président de la Commission Médicale d’Établissement :
Coronavirus : « Nous tenons. », assure-t-il le 23 mars 2020, mais « le nombre d’hospitalisations double tous les 3 jours. ».

L’épidémie liée au nouveau coronavirus progresse globalement d’est en ouest. Toute la stratégie française déployée dans cette « guerre » contre cet «  ennemi invisible, insaisissable » consiste, simultanément, à tenter d’abaisser sur la durée le nombre de personnes contaminées afin que le système de soins puisse toutes les prendre en charge, et à bâtir des digues capables d’absorber ce choc. Les hôpitaux se sont complètement réorganisés, semaine après semaine, jour après jour, depuis février 2020. La « digue » de Nancy est en ce sens capitale : entre le plus intense foyer épidémique hexagonal du Haut-Rhin, avec ses établissements de Mulhouse et de Colmar submergés, et la Champagne-Ardenne, puis l’Île-de-France, il faut qu’elle tienne. Nous nous sommes entretenus lundi matin 23 mars 2020 avec le professeur Christian Rabaud, le président de l’assemblée des médecins du CHU lorrain et chef de son service d’infectiologie.

Le Point : Quelle est la situation au CHU de Nancy, êtes-vous saturés, êtes-vous débordés ?

Christian Rabaud : Non. En tout cas, pas encore. Nous tenons. Nous majorons les capacités chaque jour, en particulier en réanimation, et pour l’instant, nous courons encore avec un temps d’avance sur l’épidémie. La journée du 22 mars 2020 en réanimation a été correcte, sans surchauffe. Dans le même temps, nous avons vu augmenter de façon importante le nombre de patients testés positifs (Covid+) aux urgences, en unité de pré-hospitalisation et devant être hospitalisés en médecine. À un moment, il y avait embouteillage. Ça a été réglé. D’ici 48 à 72 heures, nous savons que nous devrons transférer 10 à 20 % de ces patients en réanimation, car leur état va se dégrader. Nous sommes en capacité de le faire. Nous avons même un petit répit : auparavant, nous devions prendre trois ou quatre malades par jour en état grave venant de Mulhouse ou de Colmar. Leur prise en charge en réanimation est très lourde, elle mobilise très longuement les soignants. Aujourd’hui, des évacuations sont organisées vers l’Allemagne et l’ouest de la France. Et le secteur privé nous aide (les cliniques Ambroise Paré, Saint-André, Majorelle et Gentilly se sont adaptées, ont réorganisé leurs activités ; Gentilly a dédié 15 lits aux patients Covid+, NDLR). Ça nous libère des lits.

Il y a une semaine, vous accueilliez 30 malades infectés au CHU, dont un en réanimation. Pouvez-vous nous dresser précisément le bilan à ce jour ?

En début d’année 2020, mon service d’infectiologie comptait 33 lits d’hospitalisation. Aujourd’hui, 96 lits sont consacrés aux patients testés positifs, et 68 étaient occupés dimanche soir 22 mars 2020. En réanimation médicale, le CHU s’appuyait sur 30 lits. Aujourd’hui, sur 90 lits, 16 étaient encore disponibles lundi matin, les autres, 74, étaient occupés.

Êtes-vous à bout de vos ressources, ou avez-vous encore des réserves ?

Tous les postes sont importants. Sur les masques, depuis dimanche 22 mars 2020, nous avons des dotations qui arrivent. C’est beaucoup moins tendu que les jours précédents. Nous avions juste ce qu’il fallait, avec des stocks de moins d’un jour. Sur les tests, nous avons eu beaucoup de mal le week-end passé, nous savons maintenant que nous allons pouvoir passer la semaine. Sur les respirateurs destinés à assurer la ventilation artificielle des patients en réanimation, tous ne sont pas employés. Jusqu’à une jauge de 140 lits de réa à laquelle nous pouvons monter, nous avons de quoi faire au meilleur standard de qualité de prise en charge. Au-delà, nous devrons utiliser des respirateurs de transport, par exemple, qui ventilent moins bien. Ces appareils, ça ne se fabrique pas comme ça, d’un claquement de doigts.

Sur le personnel, nous bénéficions de beaucoup de médecins et de soignants dont les activités non urgentes ont été déprogrammées. Les équipes sont hypermotivées. Nous n’avons pas de manque pour l’instant. Mais il faut les former à la prise en charge du coronavirus. Par exemple, nous apprenons à des chirurgiens orthopédiques aujourd’hui inactifs, très compétents dans leur spécialité et souvent solides physiquement, des gestes simples, comme changer deux fois par jour de position des malades devant être réanimés et assistés au plan respiratoire sur le ventre. Cela demande quand même un vrai savoir-faire qu’ils n’ont pas et une demi-heure de temps, habillage et déshabillage compris, pour respecter les règles d’hygiène. On confie à des collègues de nouvelles tâches, comme rappeler les patients testés pour leur donner les résultats. On transforme, on élève le niveau de compétences d’infirmières habituellement affectées dans des services d’hospitalisation classique, des sages-femmes afin qu’elles acquièrent la compétence de gérer des moyens de réanimation, pour aider les infirmières réanimatrices habituelles. Dans l’absolu, nous n’avons pas de limitation en termes de ressources humaines.

Quel est le nombre de personnels soignants contaminés ?

Dimanche, 30 personnes de l’hôpital étaient Covid+. Nous en avons pratiquement autant qui ont été testées et pour lesquelles nous avons un doute, nous sommes – ils et elles sont – en attente des résultats. La plupart du temps, leur contamination a eu lieu hors du CHU. Tant que nous ne sommes pas en carence de personnel, ils restent confinés chez eux 8 jours, et si, pendant 48 heures, ils et elles ne présentent pas de fièvre, ces personnels reviennent travailler avec un masque. Nous maintenons leurs contacts intra-hospitaliers au travail, masqués. Nous avons pratiquement autant de personnels qui, parce qu’ils présentent une fragilité quelconque, une maladie chronique, par exemple, sont aussi confinés par prudence.

Combien de décès de patients infectés ont été constatés au CHU depuis le début de l’épidémie ?

Onze décès Covid+. Nancy est moins touché que Mulhouse et Colmar, ainsi que Strasbourg. Tout le Grand Est n’est pas débordé. Et Reims est moins touché que nous. On ne part pas du même niveau, mais la cinétique est la même partout : le nombre de nouveaux cas infectés et hospitalisés double tous les 3 jours. Nous ne sommes clairement pas en voie de déclin. Pour l’instant, nous poussons les murs pour faire face à la vague. Mais nous espérons un ralentissement à partir de dimanche 29 mars 2020.

Craignez-vous d’être débordés à moment ou à un autre ?

Nous faisons tout pour ne pas l’être. Tous les jours. C’est donc que la crainte existe. Ce matin, j’arrive à l’hôpital avec une certaine fébrilité. Il n’y a pas de jour, pas de nuit, des problèmes à régler en permanence, c’est le job. Mais il n’y a pas de malades infectés partout et n’importe où dans nos services, dans des brancards… Il y a un lieu d’accueil, une fluidité entre les urgences, les lits dédiés aux patients Covid+, les lits de réa. Nous ne sommes pas dépassés. Les jours à venir s’annoncent difficiles. La fatigue va peser. Mais nous restons optimistes, nous faisons tout pour que ça se passe le mieux possible pour les patients. Même si la maladie est très peu mortelle, elle est très contagieuse. Ce qui est insupportable et angoissant avec ce nouveau virus, pour nous-mêmes et pour tout un chacun, c’est de se demander si on va pouvoir soigner tout le monde.

Publié par Jérôme Vincent le 23 mars 2020, sur https://www.lepoint.fr/

Le CHRU de Nancy au bord de la pénurie de Sur-blouses

Le CHRU de Nancy manque dramatiquement de sur-blouses jetables pour protéger les aides-soignantes, infirmières et médecins en contact avec les malades contaminés par le Covid-19. Le stock est quasiment épuisé et un syndicat lance un véritable appel au secours le 06 avril 2020.

Le coronavirus n’en finit pas de mettre en lumière les lacunes de notre système de santé. Après le manque de masques ou de gel désinfectant, voici en effet venu le temps de la pénurie de sur-blouses. L’hôpital de Nancy est sur le point d’en faire les frais.

« Personne n’en parle actuellement. Cet équipement est pourtant aussi essentiel que les masques dans la prise en charge des patients atteints par le Covid-19. C’est indispensable pour protéger le personnel soignant et éviter la propagation de la maladie », réagit Ophélie Opfermann, infirmière et responsable syndicale CFDT au CHRU de Nancy.

« Le CHRU utilise environ 10 000 Sur-blouses par jours »

Chaque fois qu’un membre du personnel soignant entre dans une chambre où se trouve un malade du coronavirus, il doit en effet enfiler une sur-blouse dont il se débarrasse ensuite à la sortie. Plus il y a de malades, plus il faut donc de sur-blouses. C’est d’une logique imparable.

Conséquence : alors que l’épidémie bat son plein actuellement en Lorraine, l’hôpital de Nancy en fait une consommation quotidienne impressionnante. «  Le CHRU en utilise environ 10. 000 par jour  », indique Ophélie Opfermann, qui précise que la rupture de stock est pour bientôt.

« C’est une question d’heure. Nous sommes en train de faire les fonds de tiroir et nous allons être en manque d’ici la fin de ce dimanche 12 avril 2020 ou le début de la semaine prochaine. La situation est dramatique !  », s’alarme l’infirmière-syndicaliste qui lance un véritable appel à l’aide.

Des sacs-poubelles reconvertis en sur-blouses

De son côté, la direction planche sur des solutions «  alternatives » d’urgence pour faire face à cette pénurie qui «  est nationale voire mondiale ».

Il est notamment envisagé que «  les vestes de bloc puissent être portées à l’envers avec un tablier  » et que «  les casaques de bloc à usage unique puissent être utilisées dans les services et ensuite faire l’objet d’un lavage à la blanchisserie », indique l’établissement dans un communiqué.

D’autre part, des contacts ont été pris avec des sociétés privées. En particulier la SAS Schweitzer de Ludres qui fabrique des emballages plastiques.

« Elle a conçu un prototype de blouse avec de la matière plastique et nous allons pouvoir en confectionner au sein du CHRU à partir de sacs-poubelles », explique l’hôpital. Ce qui devrait lui permettre de tenir en attendant que la société de Ludres se lance dans « une production en masse ».

Publié par Christophe GOBIN le 06 avril 2020, sur https://c.estrepublicain.fr


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Robin Huguenot-Noël @r_huguenotnoel · 21 mars 2020 Solidarité contre le #Covid_19 :
Le Bade-Wurtemberg propose d’accueillir dans ses hôpitaux des patients en soins intensifs de la @regiongrandest, durement touchée par le virus. Bel exemple de ce que l’Union européenne peut atteindre quand unie & solidaire ;
Baden-Württemberg will Corona-Patienten aus Frankreich aufnehmen
https://www.deutschlandfunk.de/covid-19-baden-wuerttemberg-will-corona-patienten-aus.1939.de.html?drn:news_id=1112679

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Amélie de Montchalin @AdeMontchalin · 22 mars 2020 Solidarité
pour soulager nos hôpitaux du Grand-Est surchargés.
Après le Bade-Wurtemberg, c’est la Sarre qui ouvre des lits pour les patients #COVID19.
Résultat de notre mobilisation avec @olivierveran, @Prefet67 @ars_grand_est et @JeanROTTNER

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Renew Europe @RenewEurope · 23 MARS 2020
European solidarity at work #StrongerTogether
Germany to treat critically ill from virus hotspot in eastern France
https://www.france24.com/en/20200321-germany-to-treat-critically-ill-from-virus-hotspot-in-eastern-france

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Sciences et Avenir @Sciences_Avenir · 22 mars 2020
Coronavirus : le point de 18h sur le Covid-19, dimanche 22 mars
https://www.sciencesetavenir.fr/sante/coronavirus-le-point-de-18h-sur-le-covid-19-dimanche-22-mars_142680?utm_term=Autofeed&utm_medium=Social&utm_source=Twitter#Echobox=1584897426
L’équipe médicale s’affaire auprès d’un malade transféré depuis l’hôpital Emile Muller à Mulhouse vers un hélicoptère, le 22 mars 2020. (photo : AFP - SEBASTIEN BOZON)

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CHRU de Nancy @CHRU_de_Nancy · 26 mars 2020
Le @CHRU_de_Nancy a lancé 1 cellule de coordination des lits de réanimation #COVID à l’échelle des GHT Sud Lorraine & Vosges. Objectif : avoir en temps réel les disponibilités en lits de soins critiques pour 9 établissements publics et privés. @ars_grand_est

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Nicolas Meilhan
@NicolasMeilhan· 8 avril 2020
L’Île-de-France & le Grand-Est restent les 2 principaux clusters avec 223 & 107 décès en 24h. Si la situation s’améliore sur les réanimations dans le Grand-Est, le pic des réanimations en Île-de-France n’est toujours pas atteint alors qu’il semble passé sur le reste de la France

Pour en savoir plus :

- 5 choses à savoir sur le covid-19 avec l’expert des virus à Reims le 10 mars 2020
- Face au COVID-19 BioValley France est en recherche active de cahiers des charges pour la confection de masques (chirurgicaux , FFP1 et FFP2) le 16 mars 2020
- Covid-19 : Mobilisation du Pôle textile d’Alsace pour produire des masques protecteurs le 17 mars 2020
- Covid-19 : Les Tissages de Charlieu lancent un masque de confinement lavable le 19 mars 2020
- Covid-19 : Dépassés par la pandémie de Covid-19, les hôpitaux alsaciens au bord de la rupture le 19 mars 2020
- Covid-19 : La filière textile vosgienne au secours de la pénurie de masques le 20 mars 2020
- Covid-19 : Petit Bateau s’est associé à d’autres industriels textiles de l’Aube pour la réalisation de masques de protection le 21 mars 2020
- Covid-19 : Opération "Masques" dans le Grand Est le 21 mars 2020.
- Covid-19 : Solidarité de l’Union européenne, de l’Allemagne et de la France, pour soulager les hôpitaux du Grand-Est surchargés de patients COVID19 le 22 mars 2020
- Covid-19 : Jean Rottner : « C’est un rouleau compresseur qui nous est arrivé dessus » le 23 mars 2020
- Covid-19 : « Au CHU de Nancy, la digue tient » le 23 mars 2020
- Covid-19 : Les Hôpitaux de Paris craignent une pénurie de médicaments en réanimation le 27 mars 2020
- Covid-19 : 6e semaine, L’activité est toujours soutenue à Mulhouse le 30 mars 2020
- Covid-19 : Surblouses : le roi des emballages ménagers vole au secours des soignants le 8 avril 2020
- Covid-19 : L’usine Schweitzer, à Ludres, adapte sa production et crée des tenues pour les soignants le 09 avril 2020
- Covid-19 : Utiliser les exosquelettes au CHRU de Nancy pour aider le personnel soignant en réanimation grâce au projet ExoTur le 22 juin 2020